Grâce à Alberto Ascari, Ferrari remporte
sa première victoire au Championnat du monde de F1 et, surtout,
prend sa revanche sur Alfa Romeo, firme avec laquelle il entretient
des rapports d'amour-haine. Grâce à leurs victoires en
Grand Prix, les voitures du Commendatore acquièrent un prestige
international.
L'année 1950 sera riche en courses passionnantes
et en superbes victoires pour Ferrari, qui obtient jusqu'à trois
succès en un seul jour ! Le 7 mai, Alberto Ascari est vainqueur
au volant de la toute nouvelle Ferrari de F2, sur l'autodrome de
Modène. Le même jour, Villoresi gagne le Grand Prix de
Suisse, tandis qu'aux États-Unis, Briggs Cunningham remporte
la course du Suffolk Country. 1950 est également l'année
de la dernière victoire de Tazio Nuvolari dans la course de côte
Palerme-Monte Pellegrino, au volant d'un spider Abarth 204 A. C'est
le début du championnat de Formule 1 et Ferrari noue des
liens d'amitié avec Ascari: le pilote participera activement
à la construction du mythe Ferrari grâce à des victoires
décisives.
Comment Enzo Ferrari affronte-t-il le défi de la nouvelle F1
? Sa réaction est conforme à sa nature profonde : suivre
ses intuitions et persévérer dans ses choix. Si les Alfa
ont remporté des brassées de lauriers avec des moteurs
à compresseur, les Ferrari des prochaines années
le feront avec des moteurs atmosphériques. Aurelio Lampredi dessine
pour l'Ingegnere le premier modèle de ce type, tandis que Luigi
Bazzi le réalise. Au Grand Prix d'Italie de Monza, le 3 septembre,
Ascari dispose de la monoplace 4500 cm3 à moteur atmosphérique.
Lors des essais, il réalise le deuxième meilleur temps,
derrière Fangio. À l'arrivée, il n'est que deuxième,
mais Ferrari sait qu'il faut être patient. La confirmation
de l'excellence de son choix arrive le 14 juillet 1951 à Silverstone.
L'impact est décisif: Ferrari présente trois voitures,
respectivement pilotées par Ascari, Villoresi et Gonzalez,
tandis qu'Alfa Romeo participe à la compétition avec Fangio,
Bonetto et Sanesi. La course est le théâtre d'un duel serré
entre les deux Argentins, Fangio et Gonzalez. Ce dernier remporte
la victoire, et Ferrari, fou de joie, lui offre une montre pour l'occasion.
Bien des années plus tard, Enzo Ferrari confiera combien son
ardeur était grande, à cette époque, à battre
Alfa Romeo. Il avait alors le sentiment d'avoir offert à la marque
plus que cette dernière n'avait jamais rendu à son
jeune collaborateur. Mais, grand seigneur, Ferrari refuse de célébrer
à Silverstone la défaite d'Alfa Romeo. Alberto Ascari
offre la plus haute marche du podium à Ferrari dès 1952,
année au cours de laquelle, sur 109 participations, les
voitures du cheval cabré enregistreront 95 victoires, 47
deuxièmes places et 33 troisièmes places... La même
année, l'Italie décerne à Enzo Ferrari le titre
de Chevalier de l'ordre du Travail.
En 1953, toujours grâce à Ascari, Ferrari obtient un double
titre, Constructeurs et Pilotes. Aux États-Unis, l'Ingegnere
est l'Italien le plus célèbre, après Christophe
Colomb. La revue Guerrin Sportivo de 1954 lui consacre un numéro
entier: la couverture le présente au volant d'une monoplace
de F1, tandis que la revue titre "Miracle à Maranello".
La première Ferrari Championne du monde de F1 est pilotée
par Alberto Ascari, le coureur attitré de Ferrari en ces années
mythiques et le restera pendant quatre ans et demi. Ascari offre alors
à Ferrari tout ce qu'un pilote peut donner à son constructeur.
Mais il n'en tire que peu d'avantages matériels : Enzo Ferrari
n'est pas un homme d'argent ni pour lui-même ni pour les autres...
Enzo Ferrari pensait, avant de l'engager dans son écurie, qu'Ascari
exigeait trop des voitures : parmi ses caractéristiques
de pilotage, on notera qu'il donnait le meilleur de lui-même lorsqu'il
partait en tête. Après avoir remporté tant de succès,
Ascari quitte Maranello en 1953 pour rejoindre l'équipe Lancia,
avec son ami Villoresi. Enzo Ferrari commente ce départ par ces
mots : « Lorsque l'on demande trop à un ami, l'amitié
meurt. Et moi, je n'ai pas voulu perdre celle d'Ascari. » C'est
au volant d'une Ferrari sport 2 l, qu'il teste à titre amical,
qu'Ascari meurt le 26 mai 1955. Un choc terrible pour Ferrari, dont
la popularité augmente de course en course. Ses voitures sont
désormais célèbres dans le monde entier, de l'Europe
aux États-Unis.
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